Le temps de l’attente
- Michel
- il y a 3 jours
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Charles Delhez sj —

L’Avent est le temps de l’espérance. Marie faisait partie de ce peuple en attente d’un sauveur. Et, à son grand étonnement, elle fut invitée à accueillir le salut en notre nom. Nous n’en saurons jamais comment cela s’est passé, c’est le secret de sa liberté. Mais ce que nous savons, c’est que le Sauveur est venu : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique », lit-on dans l’évangile de Jean (3, 16), lors de la rencontre nocturne avec Nicodème.
Les premiers siècles chrétiens ont été marqués par l’attente du retour du Seigneur, la Parousie, mot signifiant à la fois attente et présence. Ce retour doit inaugurer le monde nouveau. Mais Dieu ne peut venir que dans un cœur désirant comme celui de la jeune femme de Nazareth. « La flamme du désir brûle-t-elle encore en nos cœurs ? se demandait le père Teilhard de Chardin. Le Seigneur ne viendra vite que si nous L’attendons beaucoup. C’est une accumulation de désirs qui doit faire éclater la Parousie. Il faut, coûte que coûte, raviver la flamme. Il faut à tout prix renouveler en nous-mêmes, le désir et l’espoir du grand Avènement. » N’est-ce pas ce que nous proclamons à chaque messe, sous bien des formes : « Viens, Seigneur Jésus ! » ; « Christ reviendra, Alléluia ! » ; « Nous attendons ta venue dans la gloire ! » La Bible, au livre de l’Apocalypse, se termine par ces mots : « Amen, viens Seigneur Jésus[1] ! », transposition de la formule araméenne Marana tha entrée très tôt dans la liturgie chrétienne[2].
Saint-Martin, l’apôtre du sud de la Gaule, au IVe siècle, précisait : « Le Seigneur Jésus n'a pas prédit qu'il viendrait vêtu de pourpre, ni avec un diadème éclatant ; pour ma part, je ne croirai à la venue du Christ que s'il se présente avec les habits et sous l'aspect qu'il avait lors de sa Passion et s'il porte clairement les marques de la Croix. »
Prier, c’est attendre avec espérance ce grand Jour, pour soi, et surtout pour les autres. Le Seigneur, quand Il viendra, les comblera à la mesure de notre attente pour eux. Supplier pour quelqu’un n’est possible que si je l’aime vraiment. Il y a toujours moyen de se contenter d’une litanie d’intentions qui n’exprime aucun sentiment vrai et, de plus, ne nous engage à rien. Prier en vérité, c’est être concerné par l’appel de mon frère au point de le faire mien. C’est faire mienne cette souffrance qui crie vers le Tout-Autre et accueillir en moi cette blessure ouverte qui gémit après l’apaisement.
Mais Dieu peut surprendre. Ne l’enfermons pas dans nos catégories préétablies, l’empêchant d’intervenir comme il lui plaît, avec la discrétion qui Le caractérise. Avoir la foi, estime Pierre Talec, c’est être capable de voir les délicatesses de Dieu. Nos prières ne sont pas toujours exaucées de la manière dont nous l’avons souhaité, mais jamais il ne refuse son Esprit Saint. Telle est finalement la vraie demande pour l’aujourd’hui : Seigneur, envoie-nous ton Esprit pour que nos cœurs de pierre deviennent de chair. La plus grande grâce à obtenir pour ceux que nous aimons, c’est le Souffle divin qui embrase les cœurs.
Pendant l’Avent, tournons-nous donc vers le but final de notre pèlerinage terrestre, le retour glorieux du Seigneur Jésus. Pour nous y aider, rappelons-nous sa naissance à Bethléem. Mais surtout, accueillons-le déjà dans notre présent le plus quotidien.
[1] Ap 22, 20 ; voir aussi 1 Co 16, 22.
[2] Didachè 10 , 6.

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