Sur deux siècles, le parti catholique a évolué en parti social-chrétien, puis en centre démocrate Humaniste et enfin en mouvement dénommé Les engagés. Celui-ci, explicitement, se veut sans continuité avec ce qui l’a précédé. Il s’agit d’une refondation. Cette dernière étape a été ratifiée ce samedi 14 mai. La référence à la doctrine sociale de l’Église et au personnalisme chrétien a été gommée. Ce mouvement sera neutre, sans couleur religieuse. Ainsi souhaite-t-il que les cours de religion dans le secondaire officiel soient remplacés par des cours pluralistes.
L’étiquette religieuse ne fait plus recette. C’est un fait. Les dernières élections l’ont démontré, et la descente aux enfers de l’ancien PSC était amorcée depuis des années. Les électeurs n’étaient plus au rendez-vous. La sécularisation de notre société trouve ici un point d’orgue. Les chrétiens sont maintenant strictement minoritaires et n’occupent plus une place significative ni signifiante dans notre espace sociétal.
La conséquence en est toute simple : il n’y a plus aucune raison pour les chrétiens de voter pour ce parti plutôt que pour un autre. Le monde chrétien (encore si consistant par son réseau d’écoles et d’hôpitaux, ses syndicats chrétiens), n’a désormais plus de relai politique. L’éthique sociale et familiale prônée par beaucoup d’entre eux n’est plus défendue explicitement par des élus organisés en parti, comme jusqu’il y a peu. L’électorat chrétien – mais faut-il encore compter avec lui ? – sera plus éclaté que jamais, et sans doute pas au bénéfice des Engagés.
Certes, politique et religion doivent être séparés. Leur collusion a fait assez de dégâts. L’Église en tant qu’institution n’a pas à se situer sur l’échiquier politique ni à user d’un quelconque pouvoir d’influence ou de coercition. Mais les chrétiens, eux, peuvent et doivent participer au débat public, comme tout autre citoyen. Ils ont aussi la nationalité belge, se soumettent aux lois – tout en ayant droit à l’objection de conscience – et paient leurs impôts.
Il reviendra désormais à la hiérarchie ecclésiale de faire entendre la voix chrétienne, comme elle le faisait déjà pour les grandes questions sociétales, mais sans garantie d’être entendue. L’Église a en effet droit à la parole car, à moins d’accepter de devenir une secte, elle se doit d’être partenaire de la société. L’engagement n’est pas réservé à un parti. Une culture vraiment pluraliste suppose que chacun puisse parler selon ses convictions clairement situées, sinon, le pluralisme devient une coquille vide.
M’est avis que ce qui nous manque, ce sont des visionnaires enracinés dans une tradition qui les nourrit. Des engagés, oui, mais au nom de quoi ? s’interroge un membre du mouvement. Une idéologie qui ne se dit pas, en effet, c’est comme les trains : elle peut en cacher une autre ! Mais laquelle ? Un arbre peut-il s’élancer vers le ciel sans enfoncer ses racines quelque part ? Ne serait-ce pas notre société qui n’a plus de racines ? La religion du PIB ne suffit pas. Excusez mon inquiétude !
Charles Delhez s
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