“J’espère que Dieu existe”, me répondit une jeune femme à qui je demandais si elle se mariait à l’église pour les photos ou pour la foi. Elle a d’abord reconnu que c’était pour les photos, puis elle a ajouté, regardant son compagnon : “Il y a quelques mois, nous avons vécu une expérience forte et maintenant, j’espère que Dieu existe.” Ils avaient sans doute perçu quelque chose de plus grand qu’eux, sans pouvoir encore trouver les mots pour l’exprimer.
Être croyant, c’est chercher Dieu parce qu’on espère qu’il existe et qu’on désire lui accorder sa confiance. Ce n’est pas savoir qu’il existe, car savoir, c’est d’une certaine façon posséder. Être chrétien est encore un pas de plus : c’est emprunter le chemin du Christ pour poursuivre cette recherche avec d’autres qui se situent dans sa mouvance.
Le chrétien fait le choix d’une voie parmi d’autres. Il ne peut la prétendre meilleure que les autres, mais c’est ce chemin qu’il emprunte personnellement, en fonction de son histoire, de son milieu, de ses rencontres. Petit à petit, cependant, et de plus en plus, il estime que c’est le chemin qui lui convient le mieux, celui qui est bon pour lui et sur lequel il est heureux de cheminer avec d’autres.
Jamais cependant il ne croira qu’il ait raison, mais il aura de plus en plus des raisons d’être fidèle à son choix, pour éviter de voltiger sans jamais s’enraciner. Plus il l’approfondit, plus il devient ouvert aux autres voies, car il s’approche de ce qui fait notre humanité commune. Il respecte alors ceux qui ont fait d’autres choix, car ils peuvent l’enrichir de leur propre expérience.
Bien sûr, il connaîtra le doute. N’est-il pas en train de faire fausse route ? Mais tant qu’il n’a pas de bons motifs de rebrousser chemin – ce qui peut arriver –, son doute sera vécu comme un signe qu’il demeure libre, qu’il n’est pas prisonnier d’un système.
La foi sera donc toujours un doute surmonté. N’avoir jamais douté signifierait tout simplement avoir adopté les idées de son milieu, celles qui ont été inculquées et que l’on a fait coïncider avec celles de Dieu. Mais alors qui dira si l’on croit en Dieu ou en sa propre construction rationnelle ? Avoir d’excellentes preuves de l’existence de Dieu, ne serait-ce pas finalement croire en soi-même ?
Croire n’est pas une collection d’articles de credo. Trop souvent la foi se réduit en une série de vérités, de croyances plus exactement. Or elle n’est pas la connaissance cérébrale, mais est la confiance en quelqu’un qui invite sur les chemins de son surprenant Royaume. Quand le croyant découvre que les idées de Dieu ne correspondent pas aux siennes, alors il peut poser un véritable acte de foi.
La mise en doute systématique est paralysante, elle n’est pas plus éclairante que la confiance aveugle et bornée. Foi et doute seront toujours mêlés, dans la religion comme dans la vie. La question est de savoir si ce doute se situe à l’intérieur d’une foi plus large ou si, paradoxalement, il est devenu une véritable religion qui permet de ne pas s’engager. La foi ne nous épargne pas le doute, mais permet de le vivre positivement, comme un aiguillon qui nous pousse toujours plus loin.
Charles Delhez sj
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