Appelés par notre avenir
- Michel
- 26 mai
- 2 min de lecture

Charles Delhez sj —
La science nous invite à scruter nos origines : d'où venons-nous ? Par contre, à la question où allons-nous, connaîtrons-nous la paix, la joie en plénitude, les scientifiques ne peuvent répondre. Seule l’espérance a droit de cité.
Espérer, c’est regarder vers l'avenir, deviner ce que l'on ne voit pas encore, percevoir le rai de lumière dessous la porte encore fermée. Mais attention ! Passive, l’espérance n’est qu’un espoir : je souhaite quelque chose qui ne dépend en rien de moi, ainsi une journée de plein soleil ! La véritable espérance se doit d’être active, elle m’engage : je ne peux espérer un monde meilleur qu’en y travaillant. Elle demande ma conversion : un monde de paix n’adviendra jamais si j’entretiens la guerre dans mes relations proches.
Espérance et progrès ne sont pas non plus synonymes. Le progrès est trop souvent identifié avec la croissance illimitée, les découvertes médicales ou les innovations technologiques. Tout cela peut être ambigu. Dans son Adresse à l'an 2000 (1986), l’écrivain Jean Cocteau expliquait qu'il était possible que le progrès soit le développement d’une erreur. Il faut donc toujours s'interroger : nous rend-il plus humains ?
L'espérance est un mouvement enraciné au plus profond de nous-même. Il traverse nos espoirs déçus. « Quand l'espérance m'a déçu dans un de mes espoirs, je ne puis plus être fidèle à cet espoir, il me reste à être fidèle à l'espérance », affirmait le philosophe Karl Jaspers. L’espoir meurt, l’espérance demeure. Oui, cela vaut la peine de continuer le chemin, malgré les démentis du présent. L'horizon reste prometteur. Antonio Gramsci opposait au pessimisme de l'intelligence l'optimisme de la volonté. Je constate ce qui ne va pas, mais je crois que cela peut aller mieux et je m'y attèle.
Ce mouvement est orienté. Le temps n'est pas cyclique. Il y a un horizon. Nous sommes en route vers un avenir qui, selon la foi chrétienne, a déjà pris pied dans notre histoire : le Christ, mort et ressuscité. C’est ce que nous célébrons à l’Ascension : la vie de Jésus aboutit auprès du Père. C’est là que notre existence terrestre trouvera son plein accomplissement. À la fin des temps, Dieu pourra enfin dire, avec nous, que « cela était très bon », comme il l'annonce dès la première page de la Bible.
Nous sommes « appelés par notre avenir », selon la belle expression de Christine Pedotti. Et cette espérance dans un au-delà « contamine par avance la vie quotidienne », ajoute-t-elle. Les disciples en effet ont été invités à cesser de fixer le ciel, à garder les pieds sur terre : c’est là que Jésus reviendra. En attendant, il nous partage son Esprit.
Notre société dépressive ressasse les menaces, mais l'espérance repère les promesses, les premiers bourgeons et nous ouvre à l’imprévisible. Les journaux nous abreuvent de pronostics sombres, mais l'histoire est faite d’événements que nul n'avait imaginés. Des choses que nous ne soupçonnions pas peuvent toujours survenir, ainsi la chute du mur de Berlin.
« Chaque enfant qui naît, écrivait le poète hindou Tagore, porte en lui l’espoir que Dieu n’est pas découragé au sujet de l’homme ». Un enfant apporte toujours avec lui de l’imprévu, il nous offre l’espérance. Et quand nous-mêmes renaissons d’en-haut, comme Jésus y invitait Nicodème, nous donnons une chance de plus au monde de demain.
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