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À propos des prêtres



Le dramatique rapport français sur les abus sexuels dans l’Église, le rapport Sauvé, pose la question du prêtre, de sa sacralisation et du cléricalisme. Il y a là un point focal. « Pour vous, ne vous faites pas donner le titre de Rabbi, car vous n’avez qu’un seul maître pour vous enseigner, et vous êtes tous frères » (Mt 23, 8). Laïcs et pasteurs sont donc sur pied d’égalité, ces derniers n’étant ni des druides ni des mandarins incontournables et intouchables !

Au fil des siècles, un dualisme hiérarchique s’est mis en place, une structuration binaire de l’Église. Les clercs étaient devenus des personnages sacrés, se tenant à l’écart du commun des mortels jusque – eh oui ! – dans leur sépulture qui devait être séparée de celle des laïcs[1]. C’est à leur désacralisation qu’il faut travailler.

Il ne s’agit pas de supprimer la vocation au célibat, mais d’accueillir d’autres manières de vivre ce service des communautés. Pourquoi ne pas imaginer deux modèles simultanés de clergé, l’un paulinien et l’autre corinthien ? Le modèle paulinien, à la manière de Paul donc, célibataire, œuvrerait à temps plein pour faire le lien entre les communautés, pour former et animer leurs responsables. Le modèle corinthien, quant à lui, s’inspirerait de ce que le même Paul pratiquait à Corinthe et dans les communautés qu’il fondait. Il y instituait des « anciens » issus de la communauté pour animer la fraternité et présider l’eucharistie[2].

Aux origines chrétiennes, seul pouvait recevoir l’ordination presbytérale celui qui était appelé par une communauté déterminée. C’était la communauté tout entière qui concélébrait sous la conduite de celui qui la présidait. Avant le concile de Nicée (325), même un laïc pouvait parfois y être appelé. Ne pourrait-on pas envisager cette présidence comme un service à temps partiel et même temporaire ? Si le choix vient de la communauté et que l’accent n’est plus mis sur le caractère sacré du prêtre, assimilé à un sacrificateur, la réponse peut être positive. Bien sûr, la reconnaissance par l’évêque sera nécessaire et permettra à cette communauté de rester en communion avec les autres.

Quant aux femmes, le Nouveau Testament marque un tournant, leur faisant une place importante. Saint Paul, même s’il parle encore sur fond d’une culture patriarcale, a proclamé haut et clair l’égalité de tous : « Il n’y a ni l’homme ni la femme ; car tous vous ne faites qu’un dans le Christ Jésus » (Galates 3, 28). Si l’on veut maintenir le dialogue avec la culture moderne et si, de plus, on promeut une conception moins sacrée du prêtre, ordonner prêtres les femmes serait un pas en avant dans la ligne du tournant opéré par Jésus. La première étape serait la réinstauration de diaconesses[3] et pourquoi pas la nomination de femmes comme cardinales, leur donnant un rôle de conseillères du pape et d’électrices de son successeur.

Il est permis de rêver, non ? Pour évoluer, des transgressions seront peut-être nécessaires, certaines personnes prenant de l’avance sur les réformes estimées indispensables, ainsi qu’il en va dans toute institution. L’avenir jugera de leur opportunité.



Charles Delhez sj

[1] Droit canon de 1917, n°1209 § 2. [2] Ce paragraphe s’inspire de Mgr Fritz Lobinger, Vers une nouvelle figure de prêtes, Lumen vitae 2008. [3] Le service sacramental de communautés chrétiennes se présente sous trois formes : le diacre, le prêtre et l’évêque, ce dernier étant, en communion avec le pape, responsable d’un diocèse, un ensemble de paroisses.






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