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Pas facile d’être perfectionniste !


Charles Delhez sj –


En neuf jours, être libéré de son perfectionnisme. Vraiment ? En fait, sœur Marie de la Visitation, auteure de Évangéliser son perfectionnisme, aux Éditions des Béatitudes, ne nous propose pas une neuvaine à saint Antoine pour retrouver le paradis perdu de notre perfection ! Elle désire simplement offrir à notre perfectionnisme une teinte d’Évangile et nous libérer de nos obsessions narcissiques.

Ce travers si commun est magnifiquement illustré par Hergé, ce maître de l’âme humaine ! Dans Tintin et les Picaros, on voit Peggy, la femme du célèbre général Alcazar, poursuivre son mari de son obsession de propreté. Que ce soit dans le maquis ou dans le palais présidentiel arraché de haute lutte au général Tapioca, les remarques fusent. Poussé à l’extrême, le perfectionnisme devient étouffant pour les autres. Et, pour soi, source de découragement. Car, c’est bien connu, ce n’est jamais assez parfait !


C’est la peur, le sentiment d’insécurité qui habite le perfectionniste. Il peine à déléguer aux autres, car ils ne feront pas si bien que lui. Il met aussi difficilement fin à son travail, car il est toujours inscrit sur son bulletin : Peut mieux faire ! « Il est plus facile, disait Nietzsche, d’ajouter un vers, fût-il superbe, à son poème que de le terminer. »

N’y aurait-il pas aussi, dans ce défaut, une recherche de pouvoir : tout garder sous contrôle, ne rien laisser au hasard ? Le moindre grain de sable dans la machine met en émoi. Or, dit-on volontiers, il faut lâcher prise, accepter de perdre le contrôle, ce qui suppose le deuil de notre perfection fantasmée et de nos rêves d’autosuffisance.

Le perfectionniste manie sans cesse la comparaison, cette « voleuse de joie », selon le mot de Franklin Roosevelt. Qui dit comparaison dit jalousie, victimisation, ou encore jugement de l’autre. Il est aussi incapable d’entendre les critiques. Ne serais-je donc pas parfait ? Une remarque aimable pourrait pourtant aider mais, paradoxalement, le perfectionniste se veut et se croit parfait aux yeux des autres. Critiqué, il entre dès lors dans un cycle infernal d’autojustification.

La culpabilisation le guette aussi : « J’aurais dû », « Je pourrais encore m’améliorer… » Et nous voilà dans un état d’autocritique permanent et stérile. Où est alors la joie toute simple d’un travail accompli « de son mieux », sans obsession de perfection, dans la sérénité ? Seul Dieu est parfait et la perfection de son amour peut pallier nos déficiences. Les tapissiers musulmans laissent toujours une imperfection volontaire dans leur tapis pour se le rappeler.

Dans ces pages, Sœur Marie nous apprend que le ciel n’existe pas vraiment sur cette Terre. Parfois cependant, il nous fait un clin d’œil. Il y a en effet des moments de plénitude qui nous invitent à continuer le chemin, car nous croyons que le bonheur est possible à l’intérieur même de nos limites. Jésus ne disait-il pas : « Venez-à moi. Oui, mon joug est facile à porter et mon fardeau, léger » (Cfr Mt 11, 28-30) ? N’y ajoutons donc pas le poids de notre perfectionnisme.

La prière permet d’offrir à Dieu mon travail toujours imparfait, de ne pas absolutiser notre œuvre. Le christianisme est une religion du salut : laissons à Dieu la joie de nous sauver, d’achever lui-même notre humble travail. À chaque jour suffit sa peine ! Contentons-nous de chercher à aimer toujours plus.


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