Noël, invitation à naître constamment
- Michel
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Charles Delhez sj —

« Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière », entendrons-nous de la part d’Isaïe lors de la messe du milieu de la nuit. Comme au VIIIe siècle avant notre ère, au temps d’Isaïe, le climat de notre société est morose. Que souhaiter dès lors ? La lumière, bien sûr ! Celle de l’espérance pour les peuples en guerre, pour les populations affamées, pour les familles divisées, pour les pays en crise politique, pour les personnes déprimées ou en burnout, pour les migrants en quête d’un havre de paix, pour une Église qui se cherche, pour les victimes de toutes nos violences et autres abus sexuels ou spirituels…
Tant que nous sommes vivants, nous sommes dans l’espérance. Nos espoirs ne se réalisent pas toujours, et nous sommes déçus, mais nous osons croire que l’espérance se réalisera, durant notre existence ou après, dans les générations qui nous suivent et, pour le croyant, de surcroît, dans l’au-delà. Si nous ne le croyions plus, nous serions des désespérés ; il ne nous resterait qu’à vivre comme des zombies !
L’histoire humaine est un entrelacs d’événements joyeux et difficiles, mais s’il y a des évènements positifs, comme la naissance d’un enfant, c’est qu’il y a toujours moyen d’espérer. « Chaque enfant qui naît porte en lui l’espoir que Dieu n’est pas découragé au sujet de l’homme », dit merveilleusement le poète hindou Rabindranath Tagore. Chaque enfant qui naît apporte du neuf, de l’inédit. Il est une chance de plus offerte à notre monde. Comme l’espérance, un nouveau-né est toujours fragile : il est remis entre nos mains, porteur d’un avenir qu’il nous appartient de rendre possible.
La Bible n’est pas un recueil de contes imaginaires comme Le Petit Chaperon rouge ou Blanche-neige, mais l’histoire d’un peuple où l’espérance a toujours réussi à se faufiler. À l’époque d’Isaïe, le royaume de Juda était pris en tenaille dans les tensions entre l’Assyrie et l’Égypte, mais la naissance d’un enfant royal à réveillé la joie : tout était à nouveau possible.
C’est en naissant à nous-mêmes, en renaissant sans cesse, que nous consentons au oui de Dieu. « Si tu te sens aujourd’hui capable d’un amour tout neuf que tu n’espérais pas hier, tu es en train de naître », dit un texte intitulé Voici Noël. Et un peu plus loin : « Sois sûr que la plus grande chose de la vie, ce n’est pas de vivre, c’est de naître constamment pour ne pas être vieux. »
L'histoire humaine est faite de ces événements que personne n'avait imaginés. « L’espérance authentique, ai-je pu lire, est celle qui vise quelque chose qui ne dépend pas de nous mais que nous sommes certains de pouvoir obtenir » (Josef Pieper). Qui en effet avait prévu Mozart ou Gandhi ou encore l’enfant de Noël ? « Chaque enfant qui naît est un miracle qui sauve le monde en y introduisant du neuf », disait Hannah Arendt .
Pour le chrétien, cet enfant qui nous ouvre à nouveau l’avenir, c’est Jésus. C’est Dieu qui dit oui à notre histoire humaine, qui veut la voir continuer, se renouveler, aboutir. Mais, dirait Maurice Zundel, « le “oui” de Dieu a besoin du nôtre pour obtenir son effet ». Écoutons Etty Hillesum : « Il m'apparaît de plus en plus clairement à chaque pulsation de mon cœur que tu ne peux pas nous aider, mais que c'est à nous de t'aider et de défendre jusqu'au bout la demeure qui t'abrite en nous. » Joyeux Noël !

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